Le titre du film s'apparente à celui d'une fable, et c'en est une.
J'avais vu l'an dernier L'école du bout du monde
(titre original : Lunana : a yak in the classroom), film bhoutanais de Pawo Choyning Dorji, film
nourri de symboles sur l'élévation personnelle, figurée par l'ascension
de l'instituteur jusqu'au village de montagne où il doit exercer pour
retrouver un sens à sa vie quotidienne : sorte de fiction
d'apprentissage où une expérience vécue devient fondamentale. Film à peu
près linéaire et lyrique comme un hymne, ou une prière.
Le
moine et le fusil, du même réalisateur, est résolument une comédie, où se croisent plusieurs
intrigues simples qui construisent une situation complexe. Et le
spectateur est invité, sourire aux lèvres, à réfléchir sur des notions
aussi importantes que la démocratie, la paix et la violence, le bonheur
et le progrès, en suivant le récit et sans se prendre la tête : une
sorte de fable brechtienne pour aujourd'hui, jouant comme La bonne âme du Sé-Tchouan
sur les rapports entre le conte ancien et l'actualité. Confrontant
également des mondes éloignés appelés à se rencontrer, comme l'avaient
fait jadis les films Urga (passé et modernité en Mongolie) ou Les dieux sont tombés sur la tête (passé et modernité dans le désert du Kalahari).
Car la satire n'est pas absente de ce film qui est comme une offrande : mais une satire tendre sur le pays lui-même, alors que l'ironie se fait plus mordante à propos des paradoxes des USA.
On note aussi que l'intrigue, qui garde son mystère jusqu'aux scènes finales, se résout sans victimes ni perdants : celles et ceux qui semblent jouer le mauvais rôle sont intégrés à la résolution finale sans être "punis" - même s'ils ont enfreint les lois du royaume.
Enfin, pour qui douterait encore que les amérindiens ont migré depuis l'Asie, les musiques et danses de la cérémonie finale apporteront la preuve qu'il y a du Sioux ou du Lakota chez ce peuple himalayen.
Film salutaire aux plans subtils, à voir absolument.haut de page ↑