2024 : un festival d'Avignon

 

Petit rappel liminaire : fondé durant l'été 1947 par Jean Vilar, le festival s'est inscrit d'emblée dans la perspective d'un théâtre populaire, d'une aventure culturelle ouvrant à de nouveaux publics -en particulier en province- le répertoire et la création. Lors de la première édition, trois œuvres sont présentées par Vilar dans la cour d'honneur du palais des Papes, et des expositions ont lieu dans la ville. Aujourd'hui, pour la 78ème édition, trente-cinq spectacles ont été invités, présentés dans différents lieux, dont un en itinérance dans les communes voisines, auxquels s'ajoutent de nombreux films, débats, conférences, performances ou rencontres...) Pour la deuxième année, c'est Tiago Rodriguès qui assure la direction de la colossale entreprise qu'est le festival d'Avignon.

 Mais le festival d'Avignon, c'est aussi depuis 1966 le off : André Benedetto (théâtre des Carmes) rejoint par d'autres directeurs de théâtre avignonnais (Gérard Gelas, Gérard Vantaggioli...) qui s'estiment (à juste titre) ignorés du festival, lancent comme un défi un festival off qui propose, en 2024, 1666 spectacles répertoriés à l'épais catalogue : les mille et trois conquêtes de Don Giovanni sont largement dépassées. Sans compter les spectacles de rue, les performances ou concerts impromptus, etc...qui entretiennent une ambiance proprement festive et constituent ce qu'on appelle parfois le off du off...


Je réserverai  à la fin de cet article quelques paragraphes portant plus spécialement sur quelques spectacles, mais il serait absurde et vain de faire une critique détaillée de chacun alors que le festival s'est achevé et que les chances (ou les risques) sont rares de croiser la route de tel ou tel spectacle en tournée. Je préfère commencer par les réflexions ou les impressions d'un spectateur venu plus de vingt fois au festival depuis 1979, pendant quelques jours ou pour toute sa durée. Quel état des lieux, partiel et subjectif, peut dresser ce spectateur à propos d'une manifestation qui n'a cessé d'enfler en près de 80 ans pour le IN, ou surtout en 58 ans pour son obèse descendant, le OFF ?

 

 

Impressions d’ensemble :


1) Une édition exceptionnelle : tout d'abord parce qu'elle concentre le plus grand nombre de spectacles sur une période plus courte que ces dernières années : en raison de la politique sécuritaire imposée par le ministère de l'Intérieur, aucune manifestation culturelle d'envergure n'est autorisée à partir du 25 juillet, veille de l'ouverture officielle des J.O. de Paris. Aussi les festivals d'Avignon se sont-ils tenus du 3 au 21 juillet. Extrême concentration dans les salles comme aux terrasses.  Les files d'attente se remarquent devant la plupart des lieux de spectacle.

Je relève l'accroissement du nombre de lieux disposant de plusieurs salles, comme si la tendance observée dans le commerce ou l'industrie, celle du rachat des petits par les gros, s'étendait ici aussi à l'offre théâtrale. Ce n'est pas totalement nouveau : depuis des années, rares étaient les salles uniques, mais on voit se multiplier de grands espaces offrant plusieurs salles ainsi que d'autres services (restauration, lieux de répétition, d’échanges…) : c’est un peu le supermarché adapté au service culturel. Dans ces conglomérats règne l'horreur du vide : aussi, les jours de relâche des spectacles habituels sont-ils rentabilisés par des lectures ou des présentations libres de travaux en cours : c’est du non stop et du remplissage. Autre trait qui, sans être nouveau, se répand : la présentation de spectacles en dehors du théâtre principal. Tel théâtre (par exemple La Manufacture), outre ses trois salles intramuros (à l'intérieur des remparts qui entourent le centre historique et séparent la ville en deux), propose d’autres spectacles dans tel quartier excentré, ou à la patinoire vers la plaine des sports, ou dans telle ou telle MJC de la périphérie : dans ces cas-là, on n’indique pas aux spectateurs potentiels l’adresse du lieu excentré, mais on leur fixe rendez-vous à l’avance au théâtre intramuros d'où on les conduit, en car, devant le lieu hors les murs : c’est comme les voyages organisés, la consommation culturelle extramuros s'effectue sans risque de se perdre ni d’être lâché dans la périphérie de la ville parmi les populations indigènes que l’on ne verra pas, ou de loin.


2) L’éphémère paradoxal : les auteurs du 20ème siècle que j’ai aimés et parfois connus ont presque disparu : Brecht ou Pinter, Gatti ou Beckett, Ionesco se font rares, d’autres, qui ont fait les beaux jours du off il y a peu d'années, et dont certains vivent encore, sont passés à la trappe du père Ubu, comme Haïm, Foissy, Horovitz...Visniec continue à résister vaillamment, Levey se maintient...pas grand monde au total. L’essentiel du OFF repose sur trois grandes tendances : le stand up de spécialistes plus ou moins connus, les spectacles écrits par qui les interprète ou les met en scène, et surtout cette année les créations collectives issues d’une « écriture au plateau ». Les deux dernières catégories excluent de recourir à un.e auteur.ice qui tels Corneille, Marivaux, Hugo, Tchekhov et quantité d'autres plus récents, confie son texte à des gens de théâtre chargés de le porter à la scène, quitte à le modifier au cours des répétitions, ce qui s'est toujours fait. Selon la forme et le sujet abordé, c'est désormais le travail au plateau qui génère le texte, à partir de documents, ou de textes anciens tombés dans le domaine public comme d'autres dans l'oubli : on retrouve sous une forme nouvelle la mise à l'index de l'auteur.ice d'un texte vivant, contre laquelle en son temps Beaumarchais s'était élevé. Bien entendu, le problème ne se pose pas lorsque le texte est signé d'une personne ou d'un collectif réalisant le spectacle.

Cette mutation, amorcée depuis longtemps, est désormais aboutie : rarissimes sont les auteur.ice.s contemporain.e.s qui ne jouent ni ne mettent en scène les œuvres présentées. Cependant ce phénomène côtoie  la pérennité de figures ancestrales qui tiennent toujours le haut de l'affiche : ce sont comme ailleurs les auteurs consacrés d'un large spectre anhistorique baptisé "classique" par ignorance ou par commodité, qui va d'Homère à Feydeau en passant par nos vrais classiques, Molière, Racine, etc...ou d'autres morts célèbres. Mais ce sont aussi des gens dont on n'entend plus les œuvres (ou des œuvres sur leur vie) qu'à l'occasion du off d'Avignon : on y trouve aussi bien Oscar Wilde qu’Édith Piaf, Colette ou Brassens, sans oublier un Petit Prince ou un Nez de Gogol.

Outre la danse, le mime ou la chanson, ou encore les genres traditionnels du théâtre comme la tragédie, la comédie ou autres drames, on a vu apparaître et s'imposer le "théâtre contemporain". Qu'est-ce que c'est ? C'est du théâtre, certes écrit récemment, mais qu'on ne peut faire entrer dans les catégories préexistantes. Cela va au-delà de l'époque contemporaine, mais comme l'art ou la danse ainsi qualifiés, cela suggère une démarche différente, propre à éveiller la curiosité des un.e.s, le soupçon et la méfiance des autres. Voilà un genre qui ne dit rien, parce qu'en fait il n'existe pas, mais devient dominant dans le off : le théâtre contemporain.


 3) La réduction du Temps : l’enchaînement des spectacles dans un même lieu a dès longtemps conduit à des scénographies légères (excellente chose) et parfois (pas toujours) pauvres, rapides à installer et désinstaller. Désormais cette rapidité atteint aussi les textes. L’excellence des interprètes (les comédien.ne.s savent de plus en plus faire vite et bien un tas de choses) et l’éducation du public capable de saisir en une mimique deux ou trois suggestions contradictoires font que les textes peuvent être débités à toute allure dans une biomécanique à faire baver Meyerhold sans qu’on en perde une miette. Mais comme les salles doivent être rentabilisées (c’est la seule raison que j’ai trouvée), mieux vaut entre 10 heures et 22 heures faire tenir sept spectacles plutôt que six. Aussi voit-on se multiplier les spectacles de 70 ou 75 minutes, voire de moins d’une heure, au détriment des 1h30 de naguère. Souvent, c’est parfait. Mais on s’étonne lors d’un tractage d’entendre que l’extraordinaire Dom Juan revisité dure 1h10. Si la mise en scène dépoussière et décoiffe, c’est pourtant « le texte de Molière mot pour mot » nous assure-t-on. Mais au fil de la conversation, on apprend que l’acte IV a été supprimé. De même, le Macbeth interprété en 1h15 par trois comédien.ne.s ne trahit pas Shakespeare : il va à l’essentiel.

Ainsi de nombreux lieux fonctionnent comme les juke box de ma jeunesse et proposent un temps très limité de succès éternels.


4) Théâtre patrimonial et placements financiers : dans ma jeunesse il y avait des dynasties de circassiens (Fratellini, Gruss, Zavatta, Bouglione…) dont certaines perdurent encore ou se sont diversifiées dans divers continents du monde du spectacle. Mais la transmission de théâtres de père en fils était rare. Désormais dans Avignon, la direction du Chêne noir est passée de Gérard Gelas à son fils Julien qui joue du piano, donc la programmation de ce théâtre penche naturellement vers la création musicale. Le théâtre du Balcon présente une pièce de Jean-Baptiste Barbuscia (le fils) mise en scène par Serge Barbuscia (le père). Sébastien Benedetto a repris plus discrètement la direction du théâtre des Carmes et du festival off fondés par son père André. Qui succédera aux autres pères fondateurs ?

Dans le même temps se sont ouvertes de belles salles, nombreuses, dans des bâtiments rachetés et réaménagés. Ce ne sont plus les institutions religieuses de la cité des papes qui arrondissent leur budget en louant leurs locaux. Ce sont des assureurs, des fonds de pension, des groupements financiers qui exploitent ainsi les nouvelles scènes avignonnaises.

Restent une vingtaine – ou un peu plus – de théâtres privés ou associatifs qui dans l’année proposent des cours, des petites formes, et misent sur le festival de l’été pour subsister. Ce sera plus dur cette année où le festival est amputé d’une semaine en raison des Jeux Olympiques : le ministre de l'intérieur et le plan vigipirate l'ont exigé, toutes les manifestations d'envergure devront alors être suspendues afin que toutes les forces dissuasives (militaires, policiers, milices et vigiles...) soient concentrées sur les lieux olympiques. En attendant, comme les années précédentes, on voit au milieu des touristes et des comédiens qui paradent en ville des militaires surarmés qui sillonnent l'intramuros avec la lenteur professionnelles d'acteurs de Buto : très spectaculaires.


5) Les tarifs

La hausse constatée après l'épisode chaotique du covid s'est amplifiée : la carte off largement dématérialisée est passée à 20 euros, le tarif réduit qu'elle assure oscille sauf exception entre 12 et 18 euros selon les spectacles, le plein tarif s'établissant entre 17 et 25 euros. Augmentation d'un tiers environ depuis 2021. Les restaurateurs n'abusent pas mais pratiquent des augmentations analogues, comme partout ailleurs.

En cette année d'élections où la notion de peuple est redevenue sensible, palpable, la question d'une culture populaire de qualité ("élitaire pour tous" disait je crois Jean Vilar) se pose crûment.


Retour sur quelques spectacles tout de même

 

DES RÉUSSITES

  • Montaigne Les Essais : texte de Montaigne adapté et interprété par Hervé Briaux au théâtre du Chêne noir. Ce n'est pas la première fois que j'assiste à la présentation théâtralisée d'un choix de textes de Montaigne. Ici, le spectacle sur fond stellaire semble suivre le parcours d'un jour, ou d'une nuit, qui est aussi le temps d'une vie prête à s'achever en fin de représentation. Choix particulièrement judicieux pour faire ressentir le goût de la vie. Malgré les formules un peu nombreuses dans l'urgence de la dernière partie, pas de didactisme, mais une élévation de la pensée par la conversation.... un peu rapide dans le rythme mais si naturel et juste.
  • La France Empire : ce spectacle sur la politique coloniale française et les guerres induites depuis le 19ème siècle jusqu’à aujourd’hui (Mayotte) est une performance de Nicolas Lambert seul en scène pendant 2 heures, interprétant tour à tour et parfois presque simultanément les multiples personnages que le texte évoque, de De Gaulle à Macron, du maréchal Lyautey aux généraux Schmitt ou Georgelin en passant par Leclerc de Hautecloque, tel grand-père ou prof du comédien : car l’histoire qu’on dit grande passe par les découvertes que chacun peut en faire (ou non) selon les circonstances de sa ve personnelle. Qu’au nom des valeurs de la République marquées aux frontons des bâtiments la France ait torturé ou violé, on le sait. Le spectacle est pourtant saisissant et éclairant sur la façon dont les pouvoirs successifs réduisent ou annulent la culture des peuples opprimés, et comment le savoir-faire technique des forces armées efface les traces et modifie la mémoire collective. Aujourd’hui encore, à l’heure où les autres pays du monde se penchent sur leur passé vis à vis des peuples conquis, la France reste le seul pays (avec le Japon dit-on) où une exposition de chercheurs, une recherche d’historien, peut être interdite : il s’en trouve une actuellement à Genève qui ne peut passer la frontière française.

Rien d’étonnant dès lors que l’institution scolaire éclaire peu et d’un jour très tendancieux les épisodes de la colonisation et de la décolonisation.

Nicolas Lambert présente aussi au cinéma Utopia son film La pompe Afrique le 8 juillet, jour de relâche de son spectacle théâtral. 


  • Bovary de Tiago Rodriguès, actuel directeur du festival (IN) d’Avignon, pièce présentée au théâtre de l’Entrepôt par le collectif 7 (Dijon).

Ce n’est pas la première fois que j’assiste à la représentation d’un texte où Tiago Rodriguès évoque sous un angle décalé une œuvre phare : j’avais par exemple vu un « Antoine et Cléopâtre où la pièce de Shakespeare était abordée par la pensée et les émotions qui traversent les deux interprètes des rôles-titre. Ici il s’agit du procès intenté à Flaubert à propos des bonnes mœurs par le pouvoir de Napoléon III. Dans une scénographie bi-frontale qui reconstitue une salle d’audience, les paroles des professionnels de la justice et de l’Auteur (dont la frousse est montrée) croisent les extraits du texte et les personnages du roman. Montage extrêmement subtil, rendu extrêmement vivant par le jeu et l’inventivité.

Mine de rien, le spectacle traitant principalement du rapport de l’art à la censure, interroge aussi les fonctions du style – ce style impersonnel et parfait par lequel Flaubert prétend subsumer la matière, dépasser l’ennui qu’il évoque, transcender la médiocrité. Or c’est précisément l’impersonnalité du style (sans jugement) que l’habile procureur (Pinard : interprété par une femme) dénonce. La censure perdra, mais révélera peut-être à Flaubert son talent. Et la théâtralisation, mieux qu’un film réaliste, nous fait partager bien au-delà du propos initial la sensibilité à fleur de mots qui parcourt les phrases ciselées.


  • Willy Protagoras s’est enfermé dans les toilettes : envie de découvrir cette pièce que je ne connais pas, écrite par W. Mouawad en 2004. C’est un savant délire maîtrisé, où l’histoire d’un immeuble suggère de multiples pistes d’interprétation, à commencer par les relations entre juifs et palestiniens sur la terre d’Israël : en effet, la famille Protagoras (le premier dans un lieu?) a accueilli d’abord la famille Philisti-Ralestine, avant que la cohabitation ne dégénère et que tout l’immeuble, le quartier, apportant son grain de sel, sa perfidie ou ses préjugés, ne précipite la catastrophe. Ce conte réaliste-allégorique délirant touche au plus profond des émotions. Pour cela, dix élèves du conservatoire de Montréal assurent une performance exceptionnelle dans le choix d’un théâtre pauvre et inventif – les seul accessoires étant des feuilles de papier journal.

Prodigieusement intéressant.

  •  Découverte aussi par une lecture théâtralisée de l'unique pièce de théâtre écrite par G. Garcia Marquez (Diatribe d'amour contre un homme assis). Le spectacle en cours d'élaboration devrait être abouti à l'automne prochain.

 

UNE HONTE 

Je téléphone ce matin pour réserver une place au théâtre des Amants : une comédienne y met en jeu « Une saison en enfer », je trouve cela curieux, peut-être intéressant. Demeurant au sud des faubourgs d’Avignon, je traverse la ville sur le coup de midi pour atteindre un des théâtres les plus excentrés au nord des remparts. Surprise : ils ne prennent pas la carte bleue, et la connexion internet ne passe pas dans ce lieu magnifique (chapelle baroque aménagée) : il faut acheter la place par internet en se plantant au milieu de la ruelle, sous le soleil. Le premier site obtenu (Avignon off) tient à me vendre une carte que j’ai déjà, et je consulte le site de la compagnie pour obtenir ma place.

Demandant pourquoi il n’y a que 2 spectacles dans ce beau théâtre, j’apprends que le propriétaire parisien du lieu s’en occupe peu.

Le site internet me renvoie à un site d’achat (ticketoff je crois) qui prend 1€ sur chaque vente. Donc, voici un lieu qui propose peu de spectacles par incurie du propriétaire (parait-il) et qui ne dispose ni de terminal CB ni de connexion internet. Qui oblige le spectateur à payer un supplément pour obtenir une place, sans l’avoir prévenu. Je finis par en avoir assez : de qui se moque-t-on ? Eh bien, il paraît clair qu’on se moque d’abord des compagnies (rares) qui ont le malheur de jouer dans cet endroit devant une salle quasiment vide. Et pour cause. L’incurie envers le public ne vient qu’après : notons que je n’ai pas finalisé la démarche qui eût consisté, à 5 mètres du théâtre, à fournir dans la rue mes coordonnées de CB pour obtenir une place réservée depuis des heures.

J’ai chaussé mes semelles de vent et pris le large, avec regret pour la compagnie.


Bonheur des spectacles musicaux : dans des genres très différents, avons assisté avec plaisir au duo d’auteurs compositeurs interprètes ODALVA, aux chansons poétiques sans afféterie ni esbroufe, au seul en scène (qui donne cependant la voix à trois violoncelles) de Timothée Couteau, et au trio de musique soufie Bab es Salam.

Spectacles auxquels il conviendrait d’ajouter une sorte d’ OVNI improbable : une version mimée en moins d’une heure de Mère Courage et ses enfants de Brecht par une troupe venue de Pékin : construction et invention visuelles à partir d’éléments traditionnels (masques, éventails) transposés selon la fable brechtienne : tout y est musique et silence, tout y est expressif, tout y parle à la sensibilité et à l’esprit éveillé...J’ai oublié de demander quels accords avaient été passés avec les éditions de l’Arche si pointilleuses d’ordinaire sur l’orthodoxie brechtienne.

 Dans le IN : pas vu énormément de spectacles, deux sur trois m’ont enthousiasmé.

 

  •  QUI SOM ? par la compagnie Baro d'Evel : je comprends après avoir vu cette extraordinaire rêverie fantasmatique pourquoi la présentation en était attirante alors que les entretiens avec les concepteurs étaient peu inspirants : les mots manquent pour évoquer ce spectacle peuplé de sons, d'images qui touchent l'intime de l'être et de nos rêves (cauchemars). Création permanente et performative dont les démiurges ne sauraient s'expliquer avec des mots insuffisants. C'est tout simplement à voir, à éprouver, cela nécessite de grands moyens, beaucoup de travail et d'invention, pour nous conduire en toute beauté vers nos origines, nos gouffres, nos hantises. Pour jouer sur les fondamentaux de l'Être, ce spectacle recourt à l’image évocatrice de symboles, aux arts physiques et plastiques du cirque, de la danse, de la poterie comme de la musique…
  •   Et puis, dans la carrière de Boulbon qui l’an dernier avait vu l’échec pompeux et menteur du Jardin des Délices, ce fut la terrible clameur d’un superbe texte de Rodriguès servi par la troupe de la comédie française : Hécube, pas Hécube, extraordinairement construit, puissamment et tendrement écrit et joué, qui trouve la suprême élégance de clins d’œil humoristiques sans déchoir dans cette tragédie d’une actrice appelée à jouer la tragédie d’ Hécube (Euripide) tout en vivant une tragédie personnelle. Un moment exceptionnel dans un cadre dont la nature accueille les temps immémoriaux et offre son étrange dimension aux drames humains.
  •  Les bonnes intentions de Terminal dans le charmant cloître des Célestins ne furent en regard que creux remplissage voguant sur des poncifs.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire